Prendre soin de soi

Question: Comment différencie le fait de prendre soin de soi, de s’aider et d’exercer son propre pouvoir? N'est-il pas important de faire de notre mieux pour prendre soin de notre santé, respecter le don de la vie et  éviter de devenir une charge pour les autres? Si l’apprentissage  de techniques pour prendre soin de soi peut nous aider à mieux fonctionner dans le monde pour le bénéfice des autres, comme pour le nôtre, n’est-ce pas une pratique utile, bien que secondaire par rapport à la récitation du nembutsu? En quoi notre propre pouvoir est-il différent et pourquoi est-ce qu’on nous en dissuade ?

Réponse courte: L’Autre pouvoir nous inspire pour faire un bon travail et pour faire du bon travail, on a besoin d’un bon véhicule, c’est-à-dire notre corps, notre parole et notre esprit.

Réponse plus longue: Il est certainement vrai qu’il est juste d’éviter de faire porter un fardeau excessif à d’autres personnes, ce qui implique de prendre un soin raisonnable de son corps et de son esprit. Cependant, dans le climat de notre culture occidentale, les soins  et l’aide que l’on se  prodigue à soi-même ont atteint des extrêmes, bien au-delà de ce qui est raisonnable et utile. Il ne s’agit pas tant d’une question d’auto pouvoir que d'auto-complaisance. Le pouvoir personnel fait référence à la recherche d’un salut spirituel s'appuyant sur nos propres qualités innées. Mais  ce que les agences de publicité offrent, ce n'est pas le salut !  Il faut donc d’abord dire que tout ce que vous affirmez dans votre question est parfaitement vrai. Mais, en même temps, la manière dont cela est interprété de nos jours dépasse de beaucoup le sens littéral.

Ensuite, il est facile ici  de faire une confusion dans  la terminologie. Parler d’un autre pouvoir, en tant que grâce salvatrice,  ne signifie pas que cet autre pouvoir  va tondre la pelouse à votre place, faire les courses ou la lessive. S'appuyer sur un autre pouvoir ne dispense pas de s'acquitter de ses responsabilités ordinaires.

A vrai dire, l’auto pouvoir fait  allusion au fait de croire que l’on est son propre dieu. Il situe la source et le lieu du salut spirituel en soi. L'Autre Pouvoir désigne   une attitude spirituelle qui repose sur une grâce, provenant de l'extérieur de soi. Dans la vie de tous les jours, une telle grâce peut revêtir de nombreuses formes. Il  y a d'innombrables raisons d'être reconnaissant : en particulier pour l'inspiration que nous recevons au travers de la proximité ou de l’association avec des enseignants sages et compatissants, et grâce aussi à des moyens « angéliques » tels que des visions et des rêves.

"Mange quand tu as faim, dors quand tu es fatigué."

L’autre pouvoir nous incite à mener une vie bonne et noble et nous donne l'assurance que «tout est assuré», ce qui signifie que nous n'avons pas à obtenir des résultats directement par notre propre pouvoir. Nous pouvons être certains que, quoi que nous fassions, dans le grand schéma de l'univers, nous obtiendrons, d’une certaine manière, ici ou là, de bons résultats. Si nous nous appuyons sur notre propre pouvoir, nous nous sentons hésitants, nous  demandant si nous pouvons garantir les résultats que nous avions prévus ou désirés. Mais si nous nous appuyons sur un autre pouvoir, nous n'hésitons pas, parce que tout est entre des mains beaucoup plus puissantes et compétentes que les nôtres. Nous faisons juste notre part.

Néanmoins, afin de réaliser une telle inspiration, nous devons rester en forme. Nous devons manger, quand nous avons faim, dormir quand nous sommes fatigués, prendre des médicaments en cas de maladie, faire de l'exercice, etc. Les soins personnels viennent donc naturellement. Bien sûr, de nos jours, les gens développent des idées tellement  exagérées sur  leurs «besoins»  que les soins personnels deviennent rapidement de la complaisance et finissent par devenir  malsains et prendre beaucoup plus de temps, d'argent et d'énergie que nécessaire. C'est là une distorsion.

«Self-help» est un terme dérivé d'un livre écrit à l'époque victorienne par  Samuel Smiles. C'était un livre plutôt réactionnaire, suggérant que si les gens sont pauvres, c'est parce qu'ils ne font pas assez d'effort. Cela correspond parfaitement au mouvement de la «pensée positive» qui prétend que tout le monde peut gagner la même course, si on le souhaite sincèrement. Il y a un brin de vérité dans l’idée que la détermination peut aider à la réalisation, mais cette affirmation est excessive. Le résultat est que beaucoup de personnes éprouvent inutilement un sentiment d’échec, parce qu’elles sont incapables d’atteindre dans leur vie des objectifs irréalistes. Le fait est que, tant sur le plan social que matériel, les personnes ne naissent pas avec des chances égales.

Les mesures sensées pour l'amélioration de soi sont- eh bien - sensées ! Rien dans l’idée d’un autre pouvoir ne suggère qu’il ne faut pas arrêter de fumer ou qu’il ne serait pas bon d’apprendre un nouveau savoir-faire, ou d’adopter une habitude plus saine. Tout comme un parent est heureux de voir l'enfant se développer, et l'aime même s'il est lent, ainsi les Bouddhas sont toujours heureux de nous voir grandir, mais nous acceptent aussi tels nous sommes. Cette compréhension permet de dissoudre notre sentiment de culpabilité et d’échec.

Le pouvoir propre implique généralement une sorte de perfectionnisme. Il vaut mieux être un imperfectionniste industrieux qu'un perfectionniste hésitant. Quelle que soit  l’aide personnelle que nous développons, il y aura toujours des choses que nous devons simplement accepter. Du point de vue du pouvoir propre, c'est un échec. Du point de vue  de l’autre pouvoir, c’est le sens de la réalité et le fondement de la gratitude qui fait  que, même nous, tels que nous sommes, sommes aussi grandement bénis.

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