Communication? Quelle communication?

J'ai toujours pensé que la véritable communication  ne pouvait se faire qu'en face-à-face et que les communications virtuelles - si communes aujourd'hui sur les réseaux sociaux - ne sont que de déplorables pis-aller. Pourtant, à la réflexion, il me semble qu'il convient de corriger ce point de vue par trop simpliste. Certes, rien ne vaut la richesse d'une rencontre réelle où les paroles ne sont qu'un élément d'un ensemble où tout peut devenir signifiant. Les mots s'accompagnent de toute une gestuelle, de mimiques, de regards qui ponctuent, confirment ou parfois démentent ce qui se dit. Le timbre de la voix, sa texture, son débit et pourrait-on dire, toute l'apparence de la personne nous parlent tout autant que les mots mêmes  et même parfois plus fort qu'eux. Comment, par exemple, ne pas être sensible à la sensualité de la bouche et des lèvres de la personne s'adressant à nous de sorte que nous pouvons "goûter" ses paroles ou les "boire"? Au-delà, il y a un contexte plus large donnant à chaque fois, une autre coloration à un dialogue. Les mêmes mots ont un sens différent s'ils sont prononcés dans la lumière crue d'un plateau de télévision ou s'ils sont murmurés lors de confidences échangées dans une pénombre complice. Les exemples pourraient être multiplier à l'envi Les experts en communication, les spécialistes de l'image ont minutieusement analysé tous ces facteurs. Mais cette richesse même peut être pesante et source de confusion, quand nous avons l'impression que les signes transmis ne sont pas concordants, quand nous ne nous sentons pas nous-mêmes en phase avec eux, sans compter tous les messages subliminaux  qui nous échappent. Parfois, dans un face à face, nous pouvons avoir l'impression d'être acculé, sommé de répondre ou de réagir sans pouvoir nous dérober, prisonniers de notre timidité, de notre ignorance ou de notre manque d'à propos. Les messages virtuels peuvent, par contre, nous donner un sentiment de liberté. La parole apparaît en quelque sorte dénudée, dépouillée du cortège de tous ces signes non-verbaux qui entraînent la confusion. Dans la communication directe, je suis acculé, sommé de réagir. Rien de tel dans la communication virtuelle où je m'exprime, où je m'expose, mais sans courir le risque d'être interrompu, contredit ou peut-être démasqué. Ni monologue, ni dialogue, le message virtuel occupe un étrange, mais confortable entre-deux: mes propos sont destinés à tout le monde - la foule des "amis" virtuels - c'est-à-dire à personne. Nombrilisme nous emprisonnant dans un autisme généralisé?

Qu'en pensent tous les "amis" d'Eleusis, actifs sur ce site? Pour ma part, je serais tentée de laisser le mot de la fin à Alfred de Vigny:

" Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse." 

E-mail me when people leave their comments –

You need to be a member of David Brazier at La Ville au Roi (Eleusis) to add comments!

Join David Brazier at La Ville au Roi (Eleusis)